Les Scènes

, par MiKaël Navarro

Une scène peut être considérée comme la somme de toutes les narrations connexes.
Une scène est également la plus petite unité de narrations autonome, dans le sens où elle a un début, un milieu et une fin. Vous pourriez potentiellement raconter une histoire entière dans une seule scène.
Cependant la véritable valeur d’une scène consiste à participer à la construction d’une histoire engageante et stimulante.

Pour parler de la scène, nous la décomposerons en début, milieu et fin (dans cet ordre), et dans des composantes d’engagement, de défi et de conséquences (pas dans cet ordre).

Par engagement, je veux dire saisir et retenir l’attention d’un joueur. Il ne suffit pas d’attirer leur attention ; Vous pouvez le faire en leur criant dessus. Ce n’est pas toujours suffisant pour interagir avec eux ; Vous pouvez le faire en les attaquant. Pour être satisfaisant pour les joueurs, l’engagement doit également avoir un but. Les joueurs doivent être nécessaires pour quelque chose.

Par défi, je veux dire mettre une variété de compétences et de ressources à l’épreuve. Il ne suffit pas de tester uniquement les compétences auxquelles le personnage excelle ; Vous devez également tester les points faibles du personnage. Mettez les personnages dans des situations difficiles où ils doivent utiliser une variété de ressources (contacts / équipement, chance, points d’Anarchy, karma, nuyens). Les joueurs doivent surmonter quelque chose.

Par conséquence, je veux dire que les actions du joueur ont des effets durables et significatifs, à la fois sur le succès de la mission et sur le monde dans son ensemble. Ne faites pas en sorte que les joueurs surmontent le même ensemble d’obstacles, quel que soit le chemin que les joueurs empruntent. Les joueurs doivent également être au devant de la scène, de la mission ou de l’arc de campagne, que leurs actions leur reviennent, parfois pour le mieux, parfois pour le pire. Les joueurs doivent changer quelque chose.

1. Le début

Le début de la scène est ce qui donne son élan à toute la scène. Mis à part les recommandations dont j’ai discuté dans l’article sur la narration pour la première narration MJ, vous devriez considérer ce qui suit :

  • Rappelez les objectifs et les motivations des PJ : Avant la première narration du MJ, prenez le temps de rappeler à vos joueurs pourquoi ils sont ici, dans cette scène particulière. Ils devraient avoir des objectifs clairs (même s’il y a aussi des objectifs non divulgués) et des motivations claires. Vos joueurs construisent cette histoire avec vous et ils ont besoin de quelque chose vers quoi construire et une raison de le faire. Sans objectifs ni motivations claires, les joueurs peuvent patauger et la scène commencera avec peu d’élan. Comment les joueurs parviennent à gérer leurs objectifs (connus et non divulgués) détermineront si la mission réussira ou échouera. (Conséquence)
  • Examinez les objectifs et les motivations des PNJ : Prenez un peu plus de temps avant la première narration du MJ pour examiner (pour vous-même) les objectifs et les motivations des PNJ de la scène. Lorsque vos PNJ ont des motivations claires, vous pouvez raconter des conflits réalistes et dynamiques (comme discuté dans la narration). Lorsque vos PNJ ont des objectifs concurrents ou alternatifs, vous pouvez ajouter un défi en forçant vos joueurs à contrecarrer ces objectifs plutôt qu’à remplir simplement les leurs. Peut-être qu’en plus de remporter une fusillade, les PNJ peuvent également réussir en appelant des renforts ou en verrouillant une section d’une installation. Maintenant, vos joueurs doivent faire face au conflit immédiat et arrêter un objectif concurrent. (Défi)
  • Commencez « In Media Res » : Ne commencez pas les narrations avec la phase de planification d’une mission. Demandez aux joueurs d’exposer leur plan, les prises de contacts, …, en temps de conversation, mais ça ne doit pas être la première scène. Vous pouvez même ignorer les scènes de voyage, car ce n’est pas non plus intéressant (à moins que se rendre à l’emplacement soit pertinent, comme dans un « Crawl Montage » ou une scène de poursuite). La première scène devrait commencer par le premier engagement intéressant – la première fois où les compétences ou les ressources d’un personnage peuvent être testés dans un but. Ignorez les engagements triviaux. Par exemple, si l’équipe peut facilement surmonter la clôture, commencez de l’autre côté de la clôture, déjà caché et attente dans l’ombre que la patrouille du Corpsec passe. (Engagement)

2. Le milieu

Une fois que vous avez rappelé les objectifs / motivations et que vous avez commencé la scène avec un certain élan en commençant par les joueurs déjà engagés, vous arriverez au cœur de la scène. La partie médiane est l’endroit où vous devez le plus vous concentrer. Cette partie centrale peut aller dans de nombreuses directions inattendues et c’est bien et même souhaité. Mais pour que la mission suive un arc narratif satisfaisant, il y a quelques choses que vous devriez considérer :

  • Obstacles : Lors de la rédaction d’une scène (dans le cadre d’une campagne, discuté plus tard), certains événements doivent vraiment se produire pour que la scène ait un but et propose un défi. J’appelle ces événements des obstacles. Les obstacles peuvent être statiques (« la porte est verrouillée par un Mag-Lock ») ou conditionnels (« une équipe HTR est sur place et peut être en route »). Le fait d’avoir des obstacles, au lieu d’improviser, vous permet de distribuer un défi approprié à chaque joueur tout au long de la scène ou de la mission. Je trouve que limiter les obstacles à trois par scène, maintient un bon équilibre entre la liberté de l’histoire et un défi uniformément réparti. (Défi)
  • Réévaluez le temps de mise en vedette : Ce temps, sous le feu des projecteurs, concerne les moments d’une scène où un joueur particulier devient le centre d’attention de l’histoire, brille et montre ses atouts (peut-être une compétence, un comportement ou une réplique particulière). Les joueurs aiment montrer ce qu’ils peuvent faire. Gardez un œil sur l’engagement des joueurs tout au long de la scène.
    Les joueurs qui ont du mal à décider quoi faire pourraient être sans idées parce qu’ils sentent qu’ils n’ont aucun but. Donnez-leur un but en opposant des obstacles à leur intention (c’est-à-dire si le mage s’ennuie, apportez un obstacle ou une menace magique). Si vous savez qu’un point difficile arrivera, ce qui lui permettra de briller, envisagez d’accélérer la scène à ce point. (Engagement)
  • Événements clefs : La plupart du temps, vous pouvez utiliser votre narration de MJ pour mettre en scène des obstacles le moment venu. Vous racontez simplement aux joueurs qu’ils sont devant une porte verrouillée par un Mag-Lock ou que l’équipe HTR enfonce la porte et remplit la pièce de fumée thermique et de balles, … Parfois, les narrations des joueurs feront en sorte de sauter ou de contourner votre obstacle. Si tel est le cas, n’invalidez ni ne rembobinez pas la narration du joueur. Utilisez simplement un point d’Anarchy pour y arriver en cas de besoin (si cela doit vraiment se produire). Nouvelle menace peut être une menace invisible ou un obstacle invisible. Vous pouvez également utiliser les points d’Anarchy pour introduire des événements imprévus causés par les actions des joueurs. Comme ces gangers, énervés dans une scène antérieure revenant pour en découdre. (Conséquence)

3. La fin

Même si vous considérez la scène comme une petite partie d’une histoire plus grande, les scènes individuelles sont plus épanouissantes pour les joueurs lorsqu’ils suivent une sorte d’arc narratif. Choisissez toute structure narrative que vous souhaitez et toute technique de narration que vous souhaitez, mais la plupart d’entre elles, d’une manière ou d’une autre, passent de la découverte au conflit en passant par le point culminant jusqu’au dénouemant. Peu importe comment vous le regardez, un arc narratif a toujours un point culminant avec un dénouement par la suite.

Il est important que le point culminant d’une scène :

  1. aboutisse vers la fin de la scène,
  2. et/ou vers la fin de la session de jeu, si possible,
  3. soit un point central du conflit,
  4. et être le défi le plus difficile de la scène.

Quelques considérations :

  • Insistez sur le point culminant : Lorsque vous arrivez à l’apogée de la scène, même si cela finit par être un point culminant différent de ce que vous aviez prévu, insistez dessus. Le point culminant ne doit pas forcement être un combat physique ; Il pourrait s’agir d’un conflit mental ou social intense, d’un conflit moral interpersonnel ou d’une combinaison de tout ça. Utilisez-en autant que vous le pouvez pour augmenter les enjeux (points d’Anarchy, PNJ, paysages dynamiques, astuces psychologiques, …). Faites confiance à vos joueurs pour trouver un moyen de gagner. Ils peuvent toujours fuir, rien n’est plus fustran pour un joueur qu’une défaite cuisante et un sentiment de vengeance surdéveloppé. (Défi)
  • Terminez sur la dernière conséquence intéressante : Soyez à la recherche du point culminant car ils ne se produisent pas toujours là où vous l’aviez prévu. Parfois, vers la fin de la session de jeu, vos joueurs sont encore à quelques encablures du point culminant que vous aviez prévu. Poussez, accélérez, changez ou convertissez le conflit vers un nouveau point culminant (puis appuyez-le). Peu de choses sont plus décevantes que de ne pas atteindre la fin d’une scène à la fin de la session de jeu. Votre intrigue n’est pas précieuse, mais l’engagement et le défi de vos joueurs et de l’arc narratif le sont.
    Tout comme vous avez commencé la scène avec le premier engagement intéressant, terminez la scène avec la dernière conséquence intéressante. Ne faites pas raconter aux joueurs comment ils sont rentrés chez eux, ont changés leur pantalon et ont attendu que M. Johnson les contacte. C’est sans intérêt et ennuyeux. Racontez cela vous-même ; résumez pour eux. C’est un dénouement et cela devrait être votre compétence. Faites-le rapidement et ne rallongez pas les moments qui suivent le point culminant. (Engagement)
  • Notez les faits marquants : La dernière chose à faire après une scène (ou pendant une scène pour ne pas oublier) est de noter les événements importants. Notez les objectifs atteints, les défis surmontés, les nouvelles découvertes, les nouveaux amis ou ennemis, le actions cool ou cinématographiques, et tout ce qui se démarque. Cela vous aidera non seulement lors de la prochaine session (« La dernière fois, sur Shadowrun… »), mais cela vous aidera également à établir des conséquences intéressantes pour plus tard dans la mission ou la campagne. Il aide énormément à la construction du monde, en particulier dans un jeu à narration partagé où vous ne pouvez pas planifier tout à l’avance. (Conséquence)

— 

C’est donc ce qui se passe dans une scène. Vous avez un début avec un certain élan, un milieu ouvert et une fin en apogée. Cela semble probablement familier ou même évident parce que c’est ainsi que toutes les histoires sont racontées. Mais il est facile de perdre la trace de ces éléments lorsque vous partagez une histoire avec vos joueurs et que tout le monde a des motivations différentes. Si vous, en tant que MJ, gardez les trois concepts d’engagement, de défi et de conséquence en tant que motivations personnelles, vos histoires peuvent finir par être plus gratifiantes et mémorables.

Si vous êtes un joueur et que vous vous sentez non engagé ou incontesté, n’oubliez pas que vous créez aussi cette histoire et que le monde est ce que vous en faites (utilisez plein de points d’Anarchy) ! Mettez-vous au défi, donnez les conséquences à vos amis… vos amis vous remercieront (ou vous détesteront, mais c’est amusant aussi).

P.-S.

Vous voudrez peut-être considérer les outils suivants pour gérer une scène :

  • Mis à part les jetons de points d’Anarchy, vous aurez peut-être besoin de quelques jetons supplémentaires :
    • Si vous utilisez la règle facultative pour les cibles prioritaires (p. 153), vous voudrez que certains jetons les représentent.
    • Si vous utilisez les règles maison pour les scènes de poursuite, vous pourrez également vouloir des jetons de poursuite.
    • Si vous utilisez les règles maison pour les conflits sociaux, vous voudrez peut-être des jetons pour mesurer l’influence / la résolution.
  • Vous pourriez avoir également besoin de post-it pour se souvenir des points clefs et des éléments de narration importants :
    • Si vous utilisez la règle maison pour les « montages », un tracker d’avancement est utile.
    • Si vous dirigez une campagne entière, un tracker d’intrigue (horloges) peut être utile pour suivre les factions et les ennemis.

Source : https://www.surprisethreat.com/single-post/2018/11/14/Anarchy-Primer-The-Scene